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Depuis le début, Isao Takahata est l’outsider de Ghibli : cofondateur du studio avec Hayao Miyazaki, il est longtemps resté sous-estimé, malgré son magnifique Tombeau des lucioles, en raison de la
rareté de sa production et, sans doute aussi, de son style insaisissable qui oscille entre le comic (s)trip, l’animé old school et le manga... L’ADN Ghibli infuse ses plans (plaisir absolu de l’imaginaire en fusion, génie du gag, puissance unique du récit) et pourtant, ses graphismes naïfs et ses crayonnés proches du croquis semblent à chaque fois s’offrir comme une alternative à la précision et à la finesse du trait de Miyazaki. Le Conte de la princesse Kaguya, c’est précisément ça. De loin, l’histoire ressemble un peu à celle de Ponyo sur la falaise : une princesse venue d’un autre monde doit composer avec les humains. Mais là où Ponyo... basculait vers la fable écolo mignonne, Takahata développe un discours de combattant écolo plus sombre et plus radical. Le film se déroule autour des thèmes de l’apparence, du déguisement et explore l’antagonisme entre la civilisation – sa violence et ses rites absurdes – et la nature prolifique. C’est dans le retour aux racines, au sens propre, que prend forme une idée du merveilleux comme champ de force et d’énergie pure. La vie cristalline saisie avec une délicatesse de fleur, les personnages vifs, vivants et attachants et les éclats de réalisme quasi documentaire (la fabrication des bols, séquence sublime) écrasent les plus beaux efforts des grands cinéastes. Surtout, comme dans Pompoko, ... Kaguya laisse sourdre une profonde mélancolie : sous la rage du propos, perce l’idée poétique qui fonde tout son rapport à l’environnement, celle d’une vie antérieure, oubliée, où l’homme était en contact avec la nature. C’est d’une rare beauté.
Toutes les critiques de Le conte de la princesse Kaguya
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Il est très émouvant de voir ces deux vétérans, Miyazaki et Takahata, revenir la même année faire leurs adieux en signant chacun une œuvre maîtresse.
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Bien différent du travail de son comparse du studio Ghibli, Hayao Miyazaki, Takahata ne cherche pas la perfection de la représentation par le dessin, mais bien davantage l’évocation. Souvent, les décors ne sont qu’esquissés, avec une finesse de trait exceptionnelle. C’est là la seconde et bouleversante idée de cinéma : le dessin peut tout exprimer, à moins de le considérer avec humilité.
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par Jacky Bornet
un nouveau chef-d’œuvre, en rupture avec les traditionnels mangas animés : une merveille.
Après celui de Miyazaki, c’est le grand retour de Takahata avec une splendide adaptation d’un conte libertaire du Moyen-âge.
Ce film mérite (...) a la beauté et l'esprit. La patine d'un conte venu des profondeurs de l'Histoire et de l'inconscient d'une nation, la sobriété délicate d'un dessin qui va à l'essentiel.
Génie du trait, Takahata livre un dessin animé à la beauté renversante, aux allures d’aquarelle, qui use de tons clairs et proche de l’épure.
Isao Takahata (Le tombeau des lucioles) tire un conte délicat, poétique, d’une beauté à couper le souffle. L'esthétique de ce bijou d'animation s'inspire de l'épure des estampes. Et c'est comme si des tableaux prenaient vie dans une explosion de couleurs et de formes, magnifiant la nature. Le film a été présenté au dernier festival de Cannes à la Quinzaine des réalisateurs.
Même fabriqué artisanalement à coups de crayons, le film est d'un sidérant modernisme. Il faut voir ces scènes dans lesquelles Kaguya court sur des routes japonaises : le dessin s'emballe plus vite que l'héroïne, jusqu'à exploser sous nos yeux. Du jamais-vu.
Le récit est servi par un dessin remarquable où la ligne le dispute à la couleur. Telles des aquarelles animées, le film jouit d’une incroyable fluidité, sans temps morts, si bien que les 2h17 minutes passent en un instant. Se débarrassant du superflu, le réalisateur parvient à une pureté du récit
Quatorze ans d'absence après Mes voisins les Yamada, soit le temps d'enfanter d'un chef-d'oeuvre. Avec Le Conte de la Princesse Kaguya, Isao Takahata dessine une filmographie sublime et vertigineuse qui confirme une fois encore que c'est bien lui, le maître de l'animation japonaise.
Ce film fantasque et poétique aux teintes tendres et aux traits vibrants est un ravissement pour les yeux. Que sa durée (2 h 17) ne rebute pas les petits et les grands, car ce voyage merveilleux, ode à la nature et fable initiatique, passe comme un songe.
Une superbe adaptation, toute de sensibilité et de poésie, d’un conte populaire japonais.
Le résultat est si abouti que ce "Conte..." atteint sans forcer le niveau de pureté des plus beaux joyaux du maître - entre le noir mat du "Tombeau des lucioles" et l'enivrante espièglerie de "Mes voisins les Yamada".
"Le Conte de la princesse Kaguya" est d'une splendeur rarement égalée dans le cinéma d'animation. Ce film éclate de beauté, émerveille par sa grâce, émeut par sa douce mélancolie. Un chef d'œuvre.
Isao Takahata allie ici le fusain au numérique, l'aquarelle au digital, et le résultat est d'une beauté fulgurante.
Une symphonie visuelle, un émerveillement signé Isao Takahata, l'autre pilier des studios Ghibli.
La superbe adaptation d’un conte ancestral japonais qui, tout en restant fidèle à ses péripéties, en offre une poignante relecture.
Un véritable cef d’œuvre dont le raffinement nous enchante.
Le réalisateur du Tombeau des lucioles (1988) et de Mes voisins les Yamada (2001) s’est entouré de la fine fleur des animateurs japonais pour livrer plus deux heures d’émerveillement dont les teintes pastel et la fluidité dans le mouvement font oublier qu’Isao Takahata ne dessine pas lui-même.
Toute la beauté de trait d’un maître de l’animation japonaise au service d’un conte envoûtant, parmi les plus belles réussites du studio Ghibli.
Le graphisme est au diapason de cet appel à la désobéissance : clair et détaillé comme dans les estampes, mais avec un trait irrégulier et élégamment esquissé.
Dépaysement garanti dans un imaginaire raffiné et captivant.
Takahata nous fait une nouvelle fois vibrer comme jamais tout en portant encore plus loin ses ambitions graphiques entre épure, estampes et magnificence du trait.
Graphiquement, le film est d'une beauté rarement égalée, on a l'impression de contempler une estampe relevée à l'aquarelle. Ce conte initiatique aborde avec justesse et nostalgie les rêves brisés, les amours sincères, les actes manqués, les bonheurs éphémères, le désir de liberté.
D'une sidérante beauté, “Le Conte de la princesse Kaguya” - que Takahata annonce comme son œuvre ultime - confirme que les fans d'animation sont orphelins.
Tous les sentiments au premier degré, à vif, que le trait du dessin et la beauté d’aquarelle des décors communiquaient au spectateur sont proscrits afin d’ouvrir sur une expérience constamment différée par la médiation de l’hyperconscience, l’accumulation étouffante des codes culturels et sociaux.
Avec Le Conte de la princesse Kaguya, Isao Takahata revient donc à la réalisation et livre un film à la fois merveilleux et amer.
C'est d'une poésie et d'une délicatesse infinies.
Sans verser dans la fable écologique, Takahata exalte la nature avec un trait qui se distingue des productions habituelles du Studio Ghibli. L'image est plus proche de l'ébauche, du croquis pris sur le vif, que du dessin achevé. Ce qui n'enlève rien à la fluidité et au raffinement du récit de fille tombée de la lune.
Le résultat est d’une telle originalité qu’on pardonne bien volontiers quelques longueurs – le film dure plus de deux heures. C’est une ode à la nature, pleine de fraîcheur et de charme.
Belle et intemporel, cette histoire fait rêver d'amour et de liberté. Tout simplement.