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Jamais là où on l’attend, Julie Delpy alterne dans sa carrière de réalisatrice les chroniques bobo expatriées (Two Days in Paris, On the Verge), les expériences plus audacieuses flirtant avec le genre (La Comtesse, My Zoe) et les comédies bien de chez nous. Avec ses stars au générique et son affiche aux couleurs vives sur fond blanc, Les Barbares appartient clairement à cette dernière catégorie. C’est un feel-good movie, oui, mais inspiré par l’humeur feel-bad de la France d’aujourd’hui. Le pitch est malin : en Bretagne, à Paimpont, le conseil municipal a voté en faveur de l’accueil d’une famille de réfugiés ukrainiens – mais ce sont finalement des Syriens qui débarquent… Film choral sur fond de déchirements entre ceux qui veulent tendre la main et ceux qui préfèrent fermer la porte, Les Barbares alterne les humeurs en zappant d’un personnage à l’autre, passant d’un ton grave (quand on est dans l’intimité de la famille syrienne) à plus déconnant, voire absurde (les apparitions de Marc Fraize en garde-champêtre fan de Johnny). Ces changements de registre pas très fluides donnent un côté brouillon au film, par ailleurs assez prévisible dans son propos réconciliateur. La nuance vient surtout des comédiens, d’India Hair en épouse étouffée à Laurent Lafitte en plombier attaché à la préservation de l’identité bretonne (bien qu’alsacien). Julie Delpy, elle, projette sa propre figure de chef de troupe dans un rôle d’instit’ aussi fantasque que déterminée, tenant la baraque contre vents et marées – même si les fondations, dans le cas précis, sont un peu branlantes.