L’acteur-réalisateur réussit son Full Monty aquatique, porté par un casting au sommet.
A Cannes, certains festivaliers se demandaient à la vue des premiers films présentés en compétition (Yomeddine, Leto…) si cette édition n’était pas celle des « crowd-pleasers » - vous savez, ces œuvres conçues pour faire du bien à ceux qui les regardent. Parce que le Festival de Cannes, d’habitude, est plutôt tourné vers l’inconfort, le malaise, le chaos. La projection hors-compétition du premier film signé en solo par Gilles Lellouche (Narco avait été co-réalisé avec Tristan Aurouet) semble confirmer les ambitions feel-good de cette 71ème édition. Le Grand Bain se présente clairement comme un Full Monty frenchy – une bande de quadras dépressifs et paumés font connaissance dans un cours de natation synchronisé et décident de concourir pour les championnats du monde (malgré leur absence manifeste de disposition pour cette discipline). Ce sera bien sûr l’occasion pour chacun de régler ses comptes avec l’existence. Mathieu Amalric va-t-il réussir à regagner l’estime de sa femme et de ses enfants ? Le patron de PME fauché Benoît Poelvoorde sortira-t-il de la spirale de la lose ? Le gentil rockeur ringard Jean-Hughes Anglade connaîtra-t-il enfin la gloire ? Et Guillaume Canet va-t-il arrêter de toujours bouder dans son coin avec son air constipé ?
Pas complètement exempt de défauts d’écriture (principalement dus à la difficulté de gérer un casting XXL), Le Grand Bain est néanmoins un rouleau compresseur, irrésistible, porté par l’évident sens du rythme de l’ex-clippeur Lellouche, qui a blindé son film de tubes fédérateurs et de vignettes clippesques qui font taper du pied et vous collent un sourire idiot sur le visage. Mais la vraie réussite du projet est surtout de ne pas avoir eu peur de lester ses personnages d’affects sombres, noirs, réellement désespérés. Leçon n°1 d’un bon feel-good : on aura envie de faire la ola à la fin que si les anti-héros qui s’agitent devant nous sont vraiment dans la mouise. Les personnages ici ne sont jamais ici un prétexte pour qu’un all-star cast vienne se contenter d’amuser la galerie. Non : comme chez les Toledano-Nakache ou Yves Robert, tous ces gens ont ici une partition à jouer, quelque chose de fort à incarner. Chacun dans leur registre, chacun dans l’exploration de leur persona de cinéma (Amalric l’intello, Canet le coincé, Poelvoorde la grande gueule, etc), chacun en pleine possession de ses moyens. Et ça vaut pour les filles aussi : Virginie Efira, Leïla Bekhti, Marina Foïs, toutes fabuleuses. C’est le genre de film dont on sort en débattant de savoir quel personnage est son chouchou, celui qui emporte le film (et à ce petit jeu, le nom de Philippe Katerine revient souvent dans les conversations). Du feel-good pas bête, pas mièvre, pas beauf ? Plongeon prévu le 24 octobre prochain.
Commentaires