Le Royaume Le Royaume n’a rien d’un conte de fées. Son intrigue a beau se dérouler dans un cadre idyllique (la Corse), s’ouvrir par une rencontre qui flirte avec le mystique (les retrouvailles entre une adolescente, Lesia et son père Pierre- Paul, chef de clan), et suivre les règles de la tragédie (le destin de bandit auquel nul bandit n’échappe), elle frappe d’abord et avant tout par son réalisme. En adoptant le point de vue de l’adolescente, témoin d’une histoire qui lui échappe en permanence (pourquoi son père est-il traqué ? |
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3 | Hiding Saddam Hussein La Guerre d’Irak a déjà été raconté par le documentaire, à travers le film mémorial, et réécrite par le canon Hollywoodien (American Sniper). Le cinéaste kurde Halkwat Mustafa se risque à un nouveau genre avec ce docufiction sur les dernières heures du dictateur Saddam Hussein, caché chez un fermier en Irak. Par une simple interview on fait face à un Irakien modeste, vivant au fil des saisons, qui a caché l’homme le plus recherché du pays durant 4 ans. |
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3 | Voyage à Gaza Fruit du séjour d’un jeune cinéaste franco-italien qui a passé trois mois à Gaza au printemps 2018, ce saisissant documentaire filme le quotidien de trentenaires palestiniens étouffés par la situation politique et par l’état de siège permanent imposé à la population. Au départ inspiré par le travail de recueil de témoignages réussi en 1963 par Chris Marker et Pierre Lhomme dans Le Joli Mai, Piero Usberti trouve finalement son propre style filmique et fait entendre en voix off ses poignantes réflexions personnelles sur les souffrances gazaouies. |
Damien Leblanc |
3 | L'Ombre du commandant Le principe de L'Ombre du commandant est fascinant : parler au fils et au petit-fils de Rudolf Höss, le commandant d'Auschwitz -et personnage principal de La Zone d'intérêt de Jonathan Glazer, comme le rappelle le marketing de ce documentaire (en mode : « vous avez vu le film, découvrez l'histoire vraie »). |
Sylvestre Picard |
2 | Louise Violet Après Délicieux, Eric Besnard remonte de nouveau le temps vers la France de la fin du 19ème siècle et s’intéresse à la mise en place dans un village de campagne de l’Ecole de la République, gratuite, obligatoire et laïque tout juste instaurée. |
Thierry Chèze |
1 | I feel fine Centré sur un adolescent qui souffre d’un trouble obsessionnel compulsif suicidaire, ce premier long métrage réalisé par un couple de cinéastes originaires de Floride tente de créer un mélange de tonalités qui aboutit pourtant à un assemblage de maladresses et de lourdeurs. |
Damien Leblanc |
3 | Au boulot ! Troisième film, après J’veux du soleil et Debout les femmes !, coréalisé par François Ruffin et Gilles Perret (qui a aussi sorti en début d’année le superbe La Ferme des Bertrand), cette comédie-documentaire part d’un principe simple voire un peu racoleur, ce qui se répercute sur son entame quelque peu laborieuse. |
Damien Leblanc |
3 | A toute allure On a découvert Lucas Bernard en 2017 avec Un beau voyou, une comédie policière mettant en scène un petit voyou atypique qu’un flic pré- retraité mais peu pressé de raccrocher prenait en filature. Il y avait dans ce film une fantaisie, une écriture ciselée des personnages et des situations qui dialoguaient avec le cinéma de Salvadori ou de Broca. Avec A toute allure, Bernard persiste et signe. |
Thierry Chèze |
3 | L'Affaire Nevenka C’est une affaire qui a impacté en profondeur la société espagnole, devenue aujourd’hui une des plus actives en Europe pour la défense des droits des femmes. L’histoire de Nevenka Fernández, élue à la fin des années 90 à 25 ans conseillère municipale auprès d’Ismael Alvarez, un maire très charismatique, auprès duquel, après une brève liaison, elle va vivre l’enfer sur fond d’harcèlement. Sa parole à elle valant alors, dans ce premier cas de #MeToo politique du pays, bien moins que celle de l’édile. |
Thierry Chèze |
Trois amies Ça part franchement très mal avec une voix-off en surplomb qui définit les contours du récit. Un effet dont abuse les auteurs de comédies françaises pour créer une connivence sympa entre le héros et le spectateur. La parole chez Mouret n’est pourtant pas un simple accessoire, c’est même la raison d’être de ses films. Selon ses modulations, elle impose des rythmes différents, provoque des actions ou les contrarie. Elle habille surtout physiquement et psychologiquement des personnages retenus prisonniers par des dilemmes moraux pleinement formulés. |
Thomas Baurez | |
The Substance Depuis que Julia Ducournau a prié un soir de Palme d’or (Titane en mai 2021) de « laisser rentrer les monstres », les pontes du Festival de Cannes ont ouvert les portes de la bergerie. The Substance de Coralie Fargeat, comédie ouvertement gore a ainsi atterri au milieu des huiles, en compétition. |
Thomas Baurez | |
Libre Après les voleuses… le voleur ! Après le carton de son précédent long sur Netflix, Mélanie Laurent retrouve Prime video, la plate- forme d’un autre de ses succès, Le Bal des folles, pour raconter Bruno Sulak, cambrioleur de haut vol surnommé le « Arsène Lupin des bijouteries » qui a sévi entre 1978 et 1984. Libre n’a ni la puissance émotionnelle d’un Respire ou d’un Bal des folles ni l’aspect jouissivement explosif de Voleuses. |
Thierry Chèze | |
Juré n°2 Justin (Nicholas Hoult) est un jeune homme bien sous tout rapport. Un jour, il se retrouve juré dans une affaire de meurtre ultra-médiatisée. L'accusé, James (Gabriel Basso), est connu pour être un homme violent. Il aurait tué Kendall, sa compagne, après une dispute dans un bar, un soir de pluie. Pour la procureure Faith (Collette), c'est une affaire idéale. Le coupable est tout trouvé, et elle compte bien se servir de ce procès pour booster sa campagne électorale. |
Pierre Lunn | |
Totem La vie est douce, à sept ans. Sauf lorsque la maladie frappe à la porte. La petite Sol le sait : son père va mourir d’un cancer. L’air est lourd, grave, suffocant. Et pourtant, toute la famille se réunit pour fêter l’anniversaire de celui qui se rapproche un peu plus de la mort. Regarder Totem, c’est se remémorer un vieux souvenir d’enfance, celui où les cousins se bousculent dans une maison un peu trop petite, où les mères et les tantes portent toute la charge mentale du foyer, où le gâteau crame dans le four, où l’on s’égaye d’avoir son premier poisson rouge. |
Lucie Chiquer | |
3 | Sur un fil Depuis ses débuts voilà 15 ans dans Un prophète, Reda Kateb n’a eu de cesse comme acteur d’arpenter des univers où on ne l’attendait pas forcément. Et il en va de même pour son premier long métrage réalisateur où il plonge dans l’univers des clowns pour enfants malades par le prisme d’une jeune artiste de rue qui, après une grave blessure, va s’y reconstruire et trouver un sens à son existence. Kateb assume en effet à 100% le registre ultra- émotionnel dans lequel son récit évolue, sans chercher à le complexifier inutilement pour « faire auteur ». |
Thierry Chèze |
3 | Sur un fil Depuis ses débuts voilà 15 ans dans Un prophète, Reda Kateb n’a eu de cesse comme acteur d’arpenter des univers où on ne l’attendait pas forcément. Et il en va de même pour son premier long métrage réalisateur où il plonge dans l’univers des clowns pour enfants malades par le prisme d’une jeune artiste de rue qui, après une grave blessure, va s’y reconstruire et trouver un sens à son existence. Kateb assume en effet à 100% le registre ultra- émotionnel dans lequel son récit évolue, sans chercher à le complexifier inutilement pour « faire auteur ». |
Thierry Chèze |
1 | Rivière Manon, joueuse de hockey fraîchement arrivée à Belfort dans l’espoir d’y trouver son père, croise la route d’une bande d’amis un poil casse-cou. Une bonne base pour un coming-of-age, qu’Hugues Hariche gâche hélas par la faiblesse de l’écriture de ses personnages féminins. En voulant autant aborder le lesbianisme que le sport ou même la santé mentale, il s’emmêle les pinceaux et finit par enchaîner les banalités. |
Lucie Chiquer |
2 | Le Repli Interrogé par des chaînes d’infos américaines le soir du 13 novembre, le militant des droits de l’homme Yasser Louati est sommé par les journalistes de “condamner” les attentats au nom des musulmans de France. Le premier d’une longue liste d’incidents racistes. Et alors que la France s’enfonce dans l’État d’urgence et la recherche d’un “ennemi intérieur” (vocable emprunté à l’extrême droite), le réalisateur Joseph Paris passe ici avec lui au peigne fin les soubresauts identitaires de la décennie précédente jusqu’à l’avènement d’un puissant racisme anti- musulmans. |
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3 | L'art d'être heureux Il a toujours rêvé d’être reconnu pour ses œuvres sans que jamais la gloire ne vienne frapper à sa porte. Alors Jean- Yves, le peintre, héros du nouveau Stefan Liberski (Bunker Paradise) a décidé de changer de vie et de s’installer dans une petite ville normande afin d’y trouver l’inspiration pour créer son chef d’œuvre. Nul besoin d’être devin pour comprendre que rien de cela ne se produira et c’est précisément ce qui fait le sel de ce portrait d’un loser magnifique. |
Thierry Chèze |
Flow, le chat qui n'avait plus peur de l'eau En 2019, Gints Zilbalodis apparaissait sur nos radars avec un premier long méditatif et poétique, Ailleurs, réalisé entièrement seul sur son ordinateur - sacré exploit. Cinq ans plus tard, le réalisateur letton s’est cette fois entouré d’une large équipe pour donner vie au non moins insensé Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau, film d’animation sans paroles qui met en scène un adorable matou se réveillant dans un monde où l’humanité semble s’être évaporée. |
François Léger | |
Anora De quelle manière le capitalisme impacte-t-il l’amour, le sexe, nos vies sentimentales ? C’est l’une des questions qui court tout au long de la filmographie de Sean Baker, de Tangerine à Red Rocket. Et qui anime aussi Anora, son huitième long métrage, couronné de la Palme d’or au dernier festival de Cannes, et qu’on peut facilement décrire comme une variation moderne et malpolie sur Pretty Woman – avec beaucoup de coke, de vodka et de weed pour remplacer la sucrerie hollywoodienne d’antan. |
Frédéric Foubert | |
3 | What a fantastic machine ! Et si c’était en traitant de la même manière des films de propagande nazie, du contenu pornographique sur Onlyfan, des discours de Daesh et la cérémonie de l’Eurovision que l’on pouvait saisir au plus juste la nature des images ? Avec What a fantatic machine ! (primé à Sundance) Axel Danielson et Maximilien Van Aertryck montrent comment, depuis ses origines, le cinéma est utilisé comme un outil de mensonge et de détournement. |
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3 | Souviens- toi du futur L’exposition Corps à corps, mettait en regard la collection de photographies de Marin Karmitz et celle du Centre Pompidou. Romain Goupil filme ici le fondateur de la société MK2 dans les allées de Beaubourg ou chez lui. Karmitz partage son amour pour les œuvres accumulées depuis une vingtaine d’année et qui dessinent en creux sa propre histoire. Une histoire, hantée par la Shoah donc la disparition. Que ce soient les visages dans les Shtetl d’Europe de l’Est de Vishniac ou les collages de Boltanski, un même récit traverse l’espace et le temps. Emouvant. |
Thomas Baurez |
1 | The Killer John Woo remake lui-même son plus beau film, 35 ans plus tard et à Paris. Autant arracher le sparadrap d'un coup, le résultat est désastreux : The Killer 2024 ressemble à un film Europa Corp des années 2000 (fun fact n°1 : Omar Sy joue un flic nommé Sey), où le style de Woo n'apparaît que par apparitions fugaces et frustrantes. Le pire étant l'absence de toute émotion, là où le Killer de 1989 était un mélo déchirant, une tragédie écrite au 9mm s'achevant dans les ténèbres et la mort. |
Sylvestre Picard |
3 | La Déposition Trente ans après avoir subi des abus sexuels commis par le curé de son village, Emmanuel se rend à la gendarmerie, il fait une déposition. Il dédouble l’acte d’un documentaire, tel un moyen trouvé pour confronter le monde à ce qu’il s’est passé dans son enfance : ses propres souvenirs avec les imprécisions qu’ils peuvent contenir, sa famille, la procédure pénale… Chacun des échanges entre Emmanuel et son père, de prime abord convaincu de l’innocence de l’homme d’Eglise, s’y révèle à ce titre particulièrement poignant. |
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3 | Fario C’est un jeune homme qui a perdu le désir, dans tous les sens du terme. De faire l’amour, d’abord : on le voit renoncer piteusement à coucher avec une inconnue rencontrée au hasard d’une soirée techno parce qu’il n’a pas d’érection. Puis, on le comprend peu à peu, Léo n’a plus vraiment envie de vivre non plus. Un matin, ce héros à la mélancolie flagrante doit quitter Berlin pour rentrer dans son village natal du Doubs et vendre les dernières terres de son père agriculteur, qui s’est suicidé quelques années plus tôt. Sur place, plus rien n’est comme avant. |
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3 | Chroniques chinoises Cinéaste expérimenté, apprécié entre autres pour Suzhou River ou Nuits d’ivresse printanière, Lou Ye signe un nouvel opus particulièrement captivant. Tout commence par la préparation d’un tournage de film qui reprend un projet interrompu dix ans plus tôt par un cinéaste. Mais le récit bifurque quand surgit la pandémie de Covid-19 et que l’équipe se retrouve confinée début 2020 dans un hôtel près de Wuhan et subit de violentes mesures sanitaires qui bouleversent le tournage. |
Damien Leblanc |
2 | Sitabaomba- Chez les zébus francophones Ly, paysan d’Antananrivo, vit dans une enclave rurale de la capitale de Madagascar. Son hameau est le dernier bastion de la paysannerie malgache, là où la culture du riz est le gagne-pain des travailleurs de la terre. Là, aussi, où la pauvreté est le terreau de la corruption et les hectares se négocient. En 2016, lorsque Madagascar reçoit le Sommet de la francophonie, le tapis rouge est déroulé à deux pas des parcelles de terre, désormais convoitées et contrôlées par un président, des généraux et des investisseurs étrangers. |
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2 | Challenger | |
3 kilomètres jusqu'à la fin du monde A Tulcea sur les rives du delta du Danube, la population est harnachée au poids des traditions. Chacun place sa morale où il l’entend. Dès lors, que peut un jeune garçon de 17 ans promis à un avenir dans la marine, s’il est, selon un euphémisme policier, « dans l’autre camp » (comprendre, homosexuel) ? En Roumanie l’homosexualité a été dépénalisée il y a vingt ans et il en faut plus pour que la loi s’accorde aux mœurs. Résultat, dès lors le visage de l’ado aura très vite l’apparence de celui d'un boxeur. |
Thomas Baurez |