Guide des sorties 04072018
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Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

LES INDESTRUCTIBLES 2 ★★★☆☆ 
De Brad Bird

L’essentiel
Après avoir reçu son Cristal d’honneur à Annecy, Les Indestructibles 2 avait mis tout le monde d’accord. Brad Bird était de retour.

Il y a plusieurs logiques à l’oeuvre dans les suites made in Pixar. Toy Story 2 avait parachevé le triomphe du premier, allant encore plus loin, plus haut, faisant plus fort que le film d’origine - déjà un sacré truc. Il y a les suites qui jouent avec les conventions imposées par l’original. Némo était un voyage dans l’immensément grand, Dory une aventure en bassin. Cars 1 faisait l’apologie de la décélération et célébrait l’americana éternelle, Cars 2était un trip furieux qui filait droit au Japon avec un décrochage en Italie, le tout sur une trame de film d’espionnage zinzin. Et puis, il y a Les Indestructibles 2
Pierre Lunn

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PREMIÈRE A ADORÉ

AU POSTE ! ★★★★☆
De Quentin Dupieux

L’affiche rend hommage à Peur sur la ville avec Bébel, la photo beige renvoie à l’esthétique des polars seventies, mais le film de Dupieux n’a rien d’un pastiche. L’auteur de Steak et Réalité part seulement du genre policier pour le déconstruire, craquant ses codes à sa façon, théâtrale et absurde.
Éric Vernay

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LES QUATRE SOEURS ★★★★☆
De Claude Lanzmann

L’œuvre d’une vie. Comment qualifier autrement Shoah, ce documentaire- référence de près de 10 heures qui raconte avec une puissance et une pédagogie sans pareil l’extermination des Juifs pendant la seconde guerre mondiale ? Plus de 30 ans après sa sortie, son auteur, Claude Lanzmann continue à compléter ce monument à travers des récits, alors partiellement écartés du montage. En l’occurrence ici quatre témoignages de survivantes de la plus impitoyable des barbaries dans ce programme de 4 films : Le serment d’Hippocrate, Baluty, La puce joyeuse et L’arche de Noé. Ruth Elias qui, alors tout juste enceinte, a appris qu’elle ferait partie d’un convoi pour Auschwitz. Pauline Biren qui fit partie de la force de police féminine du ghetto de Lodz. Ada Lichtman, l’une des seules cinquante personnes ayant survécu au camp de Sobibor. Hanna Marton sauvée par un singulier marchandage (plusieurs milliers de dollars par Juif épargné) entre le hongrois Rudolf Kastner et le nazi Adolf Eichmann, le « cerveau » de la fameuse solution finale. Lanzmann a capté ces témoignages chez elles, dans l’environnement familier et enveloppant de ces femmes qui contraste évidemment avec la violence de ce qu’elles ont subi. Cet homme est un passeur hors pair aux qualités d’écoute hors normes. Des mots bien sûr dits par ces voix qui tremblent rarement comme pour ne rien céder à leurs bourreaux mais plus encore ces silences et ces regards traversés, de temps à autre, de ces images insoutenables impossibles à chasser de leurs mémoires. Quatre documents d’exception réunis dans un film indispensable.
Thierry Cheze

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PREMIÈRE A AIMÉ

JOUEURS ★★★☆☆
De Marie Monge

La rencontre entre Ella, serveuse dans le bar de son père, et Abel, un nouvel employé, transpire la fièvre. Dans le premier quart d’heure de son premier film, Marie Monge capte parfaitement l’urgence du désir, son impérieuse nécessité en dépit de toute objectivité : Abel est un voyou, magnifique certes, mais un voyou qui détrousse la caisse d’Ella avant de l’ensorceler. Trompée mais séduite (à moins que ce ne soit l’inverse), Ella est l’incarnation d’une vie rangée qui réclame de la nouveauté et de l’imprévu. Avec Abel, elle va être servie : accroc au jeu, il va l’entraîner dans des cercles plus ou moins clandestins où leur amour va se consumer sous l’effet de cette addiction ruineuse plus forte que tout. Pas exempt de défauts (une narration par trop elliptique qui creuse une distance entre les personnages au lieu de la resserrer ; des seconds rôles, à l’exception du pote joué par Karim Leklou, inexistants), Joueurs séduit par sa capacité à mélanger les genres et à privilégier le rythme et la musicalité des scènes et des plans. Pour ces raisons, on a beaucoup évoqué à Cannes -le film concourait à la Quinzaine des Réalisateurs- une parenté écrasante avec Scorsese. On pense plutôt à Jacques Audiard, à son goût pour les personnages de marginaux et les rencontres fortuites fatales -coucou Sur mes lèvres. Marie Monge se cherche, tâtonne, expérimente. C’est en soi suffisant pour la distinguer du tout-venant des réalisateurs se reposant sur leurs acquis.
Christophe Narbonne

À LA DÉRIVE ★★★☆☆
De Baltasar Kormákur

L'islandais Baltasar Kormákur a prouvé son efficacité avec quelques thrillers hollywoodiens relaxants (Contrebande, 2 Guns, Everest). Le voilà embarqué dans une histoire (vraie) de naufrage où le couple Shailene Woodley et Sam Claflin se retrouvent perdus en plein Pacifique, à la merci de la famine et de la noyade. Aventure et romance sont dans un bateau : A la dérive coche toutes les cases du survival aquatique, mais avec beaucoup de métier (Kormakur avait déjà exploré le genre dans Survivre) et une belle idée de montage alterné (jusqu'à un twist final joliment déceptif) qui relance l'intérêt du film dans les temps morts. Shailene Woodley, également productrice du métrage et présente à chaque image, affronte avec une crédibilité époustouflante les nombreuses épreuves du film.
Sylvestre Picard

LE DOSSIER MONA LINA ★★★☆☆
DEran Riklis

Chroniqueur inlassable des relations tumultueuses entre Israël et les pays arabes, l’israélien Eran Riklis (La fiancée syrienne) aborde pour la première fois cette question par le prisme du film d’espionnage. Et raconte l’exfiltration de Mona, une Libanaise soupçonnée par le Hezbollah d’être une taupe des services secrets israéliens. Pour la protéger, le Mossad décide alors de l’envoyer en Allemagne et de lui façonner un nouveau visage. Et la cache dans un appartement sous la protection d’une de leurs agents, Naomi, le temps qu’elle se remette de l’opération. Une fois ces scènes d’installation posées, Le dossier Mona Lina se vit comme un huis clos sous haute tension, où chaque bruit, chaque inconnu qui entre dans l’immeuble paraît suspect. Où le frisson naît du hors champ, laissant l’imagination du spectateur vagabonder au rythme de celle aux aguets des deux héroïnes. Car ce huis clos se révèle aussi et avant tout un film de femmes à travers ce lien troublant qui va peu à peu se tisser entre Mona et Naomi. Entre une mère qui craint de ne jamais revoir son fils et une veuve hantée par le souvenir de son compagnon tué par une balle qui lui était destiné. Neta Riskin et Golshifteh Farahani donnent merveilleusement corps à ces deux personnages ballotés entre réalité et cauchemars dans leur rapport à ce monde extérieur, symbole tout à la fois de liberté et de danger mortel. Et Riklis sait préserver ce climat intense sans multiplier les rebondissements artificiels. Même si son film a tendance à perdre de sa puissance hors les murs de cet appartement hambourgeois. 
Thierry Cheze

WOMAN AT WAR ★★★☆☆
De Benedikt Erlingsson

Woman at war s’ouvre sur l’image d’une femme dégommant au tir à l’arc les câbles électriques qui alimentent une usine. Seule contre l’industrialisation des Hautes Terres d’Islande. Organisée comme un boy-scout, elle va ensuite se planquer pour éviter les flics avant de reprendre sa vie bien tranquille de chef de chorale. Le long-métrage de Benedikt Erlingsson est un nouveau genre de film militant, du genre à vous faire rire avant de vous faire réfléchir. Le combat pour l’environnement passe après le burlesque des situations que traverse cette Don Quichotte de la mondialisation. Et puis, une histoire personnelle vient transcender le combat politique. Il lui faut choisir à cette Amazone islandaise : devenir mère ou hors-la-loi. La réponse vaut le détour. Menée par l’énergique Halldora Geirharosdottir, Woman at war est un bijou de folie. Drôle et écolo.
Sophie Benamon

L’ÎLE AU TRÉSOR ★★★☆☆
De Guillaume Brac

L’île de loisirs de Cergy-Pontoise n’est pas un terrain vierge au cinéma : en 1987, Eric Rohmer y tournait L’ami de mon amie. Si L’île au trésor nourrit bien une filiation géographique avec le dernier volet du cycle Comédie et Proverbes, c’est surtout dans le marivaudage des Contes de juillet du même Brac (en salles le 24 juillet) que la patte rohmérienne se fait le plus ressentir. Mais revenons sur L’île. C’est dans cette oasis cerclée par l’Oise que les habitants de la banlieue parisienne et des alentours viennent s’offrir une parenthèse oisive. On y croise des gens de conditions sociales et ethniques variées. Qu’ont en commun ces gamins en pleine incruste illégale avec ce prof retraité cherchant difficilement à sortir de sa solitude, ces ados flirtant sur des flyboards et ce couple d’immigrés afghan au passé douloureux, les souvenirs tourmentés de ce veilleur de nuit guinéen et les sourires radieux de cette famille philippine ? Brac tisse un lien secret entre eux, sans commentaires. Les blocs de temps s’agrègent organiquement, dessinant, telles les pièces d’un puzzle impressionniste, un territoire pacifié, presque utopique. Ça et là, on reconnait un personnage déjà présenté auparavant, au détour d’un second plan, d’une remarque. C’est le cas de l’attachant playboy Jérémy, Dieu du pédalo pour qui tout parait "magique". Son insouciance, déjà gâtée par la mélancolie d’un Eden en voie d’obsolescence, donne à ce documentaire choral alternant rires et spleen sa belle note douce-amère.
Eric Vernay

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

MES FRÈRES ☆☆☆☆☆
De Bertrand Guerry

Deux frères, anciennes gloires de la scène rock indé, vivent désormais reclus sur une île, pansant tant bien que mal leurs blessures : Rocco est gravement cardiaque et dépressif, Eddy ne parle plus. Il faut pourtant continuer à vivre pour Simon, le fils de Rocco… Doloriste au possible, ce premier film souffre d’un manque de hauteur et de nuances qui le rend par moments ridicule. Il n'est pas aidé par le jeu des acteurs, totalement en roue libre.
Christophe Narbonne

 

Et aussi
Lotte du village des inventeurs de Heiki Ernits
Tamara Vol. 2 d’Alexandre Castagnetti
3 contes de Borges de Maxime Martinot
Femmes du chaos vénézuélien de Margarita Cadenas
American nightmare 4 : les origines de Gerard McMurray

 

Reprises
L’œuf du serpent de Ingmar Bergman
Out of Africa de Sydney Pollack
L’une chante, l’autre pas d’Agnès Varda
Le journal d’un curé de campagne de Robert Bresson