A l’affiche aujourd’hui à Cannes du très attendu deuxième volet de Mektoub my love, Hafsia Herzi a réussi de très beaux débuts de réalisatrice à la Semaine de la Critique
A quand remonte votre envie de réaliser?
Hafsia Herzi : Je crois que j’en ai eu envie dès les premiers jours sur le plateau de mon premier film comme comédienne, La Graine et le mulet. J’ai d’ailleurs réalisé un premier court, La Rodba dès 2010. Puis j’ai développé un premier scénario de long, Bonne mère, inspiré par ma propre mère. Mais un film, c’est long à monter financièrement ! Or, j’étais de plus en plus habitée par un besoin impérieux de filmer. Jusqu’à ce qu’un jour, je me réveille en me disant que je devais absolument tourner sans attendre. J’ai donc repris dans mes tiroirs un autre scénario que j’avais écrit, Tu mérites un amour, dans l’idée de l’auto- produire et de me confronter au fait de réaliser un film sans grand moyen. J’ai donc réuni une petite équipe de 4 techniciens – qui sont tous chefs de poste pour la première fois – pour leur expliquer mon projet. Ils m’ont suivie et on s’est embarqués dans cette aventure.
Pourquoi avoir eu envie de parler d’amour pour votre premier film à travers ce personnage central qui peine à se remettre d’une rupture ?
Parce que l’amour constitue à mes yeux un éternel questionnement où il n’y a ni remède ni solution. Quel que soit ton âge, quelle que soit ta classe sociale, passer à autre chose paraît dans ces moments- là totalement impossible. J’ai eu envie de m’emparer de ce sujet en faisant fi de toute pudeur. Quand mon personnage est triste, il est vraiment triste, comme si quelqu’un de proche d’elle venait de mourir. Alors que souvent, au cinéma, dans ces scènes, la caméra se détourne. Pas la mienne car je voulais réussir à traduire physiquement la détresse infinie dans laquelle on se trouve à ce moment- là où on se trouve totalement désemparé car sans aucun moyen d’agir : le cœur et le corps de l’autre ne vous appartiennent pas
Il était évident dès le départ que vous tiendrez le rôle principal de Tu mérites un amour ?
Non car je me suis vraiment lancée dans ce projet avec l’unique but de réaliser. Mais j’ai tout de suite compris que le tournage risquait de s’étendre sur plusieurs mois à raison de quelques jours par ci par là. Et je savais qu’au moins je pourrai compter sur moi pour être libre ! (rires) Ensuite, une fois sur le plateau, j’ai souvent oublié la caméra. Ce qui est, je vous l’accorde un peu n’importe quoi, pour sa première réalisation ! Mais j’étais emportée par ce qui se passait, par la manière dont mes partenaires se sont emparées de leurs rôles en amenant le scénario plus loin que ce qui était écrit. Je leur répétais d’ailleurs que je me foutais du respect du texte à la virgule près. Seul m’importait qu’ils ressentent les choses pour mieux les transmettre et de ce côté- là, j’ai été servie ! Tu mérites un amour a dépassé ce que j’imaginais, en termes d’émotion et de fous rires. Ce film est vraiment né sous une bonne étoile.
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