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A coups de cadrages et d'éclairages très composés, de flashs surréalistes, le réalisateur distille de l'étrangeté un peu partout à l'image. Clinique et froid, onirique et concret, cet objet atypique classe définitivement Jean-Marc Moutout parmi les jeunes cinéastes les plus intéressants de sa génération.
Toutes les critiques de La fabrique des sentiments
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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C’est à une subtile méditation sociologique sur notre contemporanéité que nous invite Jean-Marc Moutout. Nous sommes avec son film, en compagnie de nos semblables, confrontés à cette vie qui pour chacun d’entre nous est une douloureuse aventure qui, de plus en plus, va trop vite et ne laisse pas de temps au temps des amours. Pour lutter contre le rythme effréné de notre monde moderne, nous fabriquons des sentiments et nous nous en servons comme d’une carapace pour nous protéger de notre époque difficile. Il n’y aura pas de « grand soir » pour nos vies sentimentales, voilà ce que dit, nous fait comprendre « La fabrique des sentiments ». Elsa Zylberstein est belle et juste dans le rôle d’Eloïse libre, mais seule. Des sentiments terriblement humains, les nôtres. Vous avez plus de sept minutes pour les rencontrer.
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Ces quelques saillies mises à part, le film est grinçant, sinon désespéré, face au diagnostic sociétal qu'il établit. (...) Aujourd'hui, avec une grande finesse d'écriture et davantage d'habileté à donner vie à ses idées, il [Jean-Marc Moutout] poursuit une analyse du présent assez rare dans le cinéma français. Un tel travail s'accommode-t-il jusqu'au bout des impératifs de la fiction ? C'est la question que nous laisse finalement le film, avec son épilogue charmeur mais simplificateur - style : quoi qu'il arrive, on n'est jamais satisfait de ce qu'on a -, assez loin des gouffres pertinents ouverts en chemin.
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Condamnée à l'insatisfaction, à une fuite perpétuelle, à des rêves illusoires et des conditionnements qui la font basculer dans un univers quasi fantasmagorique (ces scènes ne sont pas les plus convaincantes), Eloïse n'est plus elle-même, mais un petit robot obsédé par l'artifice, la promotion, la sociologie des sentiments auxquels elle croit de bon ton de se conformer. Avant de trouver son salut (?) en conjuguant une vie de couple pépère avec la navigation sur Internet, elle subit quelques épreuves. Jean-Marc Moutout a-t-il eu raison de faire basculer le mal-être de son héroïne en épreuve physique ? La pathologie médicale, avec vertiges symboliques, dont souffre alors Eloïse peut sembler un rien démonstrative, illustrant par une défaillance corporelle sa conscience de ne pas être au diapason de ce qu'elle s'était imposée. Convenons toutefois que ce type de panique au moindre pépin de santé est l'un des symptômes du désarroi contemporain. On trouvera aussi dans La Fabrique des sentiments une étude judicieuse de la manière dont se règle le sort du troisième âge. Jean-Marc Moutout a un regard acéré sur notre époque.
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Tout le talent de Jean-Marc Moutout est de rendre visuelle la vie mentale. Le portrait existe grâce à Elsa Zylberstein, qui fait d'Eloïse une jeune femme toute en nuances, ni victime, ni naïve, ni déprimée, efficace professionnellement et sentimentalement frigide.