Warner Bros

Fin de la trilogie Le Hobbit à partir de 21h sur France 2.

Voici ce que Première avait pensé de La Bataille des cinq armées à sa sortie fin 2014.

Comme c’est le cas depuis le début de la saga, la Warner a fait le choix (délibéré ?) de montrer à la presse française ce troisième volet du Hobbit dans sa version 24 images/seconde et non en HFR - c’est à dire en 48 images/secondes, tel qu’il a été véritablement conçu par son auteur. Résultat : certains se plaignent déjà de la “rapidité des mouvements (de caméra) qui défient parfois la perception humaine”. Et ils auront (presque) raison.

Le Hobbit : pourquoi la version longue est indispensable

Ceux qui ont goûté aux deux précédents Hobbit au format HFR, savent que ce format là permet d’offrir une netteté absolument délirante au moindre mouvement de caméra, zappant l’effet "rollercoaster qui fout le tournis" pour procurer un confort et un effet de sidération visuel inoubliable. Plus qu’aucun autre opus de la saga, cette Bataille des Cinq Armées, multipliant dans sa dernière heure les travellings qui filent comme des balles traçantes, se doit d’être vu en HFR. Résultat, compliqué de considérer cette projection en 24 images/seconde autrement que comme un appetizer de luxe, un plaisir réel mais pas vraiment roboratif. Un sentiment accentué par la durée relativement modeste du film (140 minutes, quand même) dont les coupes narratives se voient à l’oeil nu (Jackson a déjà annoncé que la version longue durerait une bonne demie heure de plus). C’est la grande limite du système expérimental mis en place par son réalisateur, qui à force de multiplier les formats et les versions et obligé de se dépatouiller comme il pouvait de son découpage étrange en trois parties, n’aura offert au final qu’un gros lot de frustrations à ses spectateurs.

Ian McKellen : "Le Hobbit a été un voyage mouvementé"

Sensation continue de jamais-vu
Reste qu’une grande partie du charme infinie de cette saga réside précisément dans ce caractère prototypique, cette manière de nous présenter des objets pas toujours très bien fignolés mais d’une singularité extrêmement stimulante. C’est encore le cas avec cette Bataille des Cinq Armées dont le storytelling cabossé finit par s’évanouir derrière la toute puissance des morceaux de bravoure stylistique, la sensation continue de jamais-vu et l’émotion qui noue la gorge (enfin !) au moment du photo finish. Débarrassé de la solennité propre à la saga du Seigneur des Anneaux, Jackson aura emballé son Hobbit comme un môme déballe ses cadeaux, la tête en désordre et les mains chauffées à blanc par l’adrénaline. Le chaos stupéfiant qui régit la dernière heure de ce volet final restera comme l’expression la plus vivace de ce sentiment là, passant frénétiquement d’une échelle de plan à l’autre, imaginant chaque recoin de décor comme une zone de jeu à inspecter de fond en comble et zigzaguant entre batailles rangées obstruées par les particules de poussières et duels à l’arme lourde organisés sur des patinoires géantes. Lorsqu'il touche du doigt ce genre de maestria, pleine de grâce et de brutalité, La Bataille des Cinq Armées réveille un petit frisson qu’on croyait éteint depuis la découverte des grands Tsui Hark (d’ailleurs accentué par des effets de post prods parfois, hum, hésitants).

Reste néanmoins un drôle de manque : celui du film, le vrai, en version longue et HFR 3D, cet objet encore camouflé derrière les montées d’euphorie, les zones de brouillard du framerate et la table de montage du gros barbu. Peut être qu’on ne le verra jamais, peut être qu’il faudra simplement se contenter de l’imaginer. Et peut être même qu'au fond c’est encore mieux comme ça.

François Grelet


Orlando Bloom : "Je dois tout à Legolas"