La Nouvelle femme
Ad Vitam

L'actrice italienne Jasmine Trinca incarne cette pédagogue qui a bouleversé l'éducation au début du XXe siècle.

En 1900, Lili d’Alengy, célèbre courtisane parisienne, a un secret honteux - sa fille Tina, née avec un handicap. Peu disposée à s’occuper d’une enfant qui menace sa carrière, elle décide de quitter Paris pour Rome. Elle y fait la connaissance de Maria Montessori, une femme médecin qui développe une méthode d’apprentissage révolutionnaire pour les enfants qu’on appelle alors « déficients ». Mais Maria cache elle aussi un secret : un enfant né hors mariage. Ensemble, les deux femmes vont s’entraider pour gagner leur place dans ce monde d’hommes et écrire l’Histoire.

Ad Vitam dévoile la bande-annonce de La Nouvelle femme, film sur l'éducation qui a fait sensation au dernier festival de Sarlat, justement destiné aux jeunes étudiants en cinéma. Jasmine Trinca (La Chambre du fils) et Leïla Bekhti (Je verrai toujours vos visages) y incarnent deux figures féminines et maternelles que tout semble opposer : la pédagogue Maria Montessori, qui a réellement existé et dont les recherches ont bouleversé l'éducation au début du siècle dernier, et Lili d'Alengy, courtisane de fiction, mais inspirée de diverses femmes de cette même période, usant de leur séduction pour se faire une place dans la société.


Sa co-auteure et réalisatrice, Léa Todorov avait participé à l'écriture d'un documentaire sur l'évolution des méthodes de pédagogie (Révolution école 1918-1939, de Joanna Grudzińska, diffusé en 2016), ce qui l'a poussée à se plonger dans la vie de cette femme d'exception, qui a valu à son interprète un prix d'interprétation. Elle replace aussi les enfants en situation de handicap au cœur du débat, en montrant que la célèbre méthode Montessori était à l'origine développée pour aider des jeunes "déficients" comment ils étaient appelés à l'époque, cachés du monde dans des centres spécialisés.

Rencontrée au festival de Sarlat, elle nous a raconté ce qui l'avait séduite dans le parcours de cette femme, et pourquoi elle avait décidé de mélanger histoire vraie et fiction pour en faire un portrait riche. Voici un extrait de cet entretien à lire en entier au moment de la sortie du film en salles, le 13 mars prochain.

"Il y a bien un film qui m'a servi de référence, c'est Amadeus. Pour la capacité de Milos Forman à respecter et bousculer en même temps le film d'époque. Il a pris des libertés avec la vie de Mozart, tout en étant à la fois très fidèle à un esprit, c'est quelque chose que je trouvais captivant. C'était ça pour moi la ligne à suivre. Pas celle des biopics 'classiques'.

Souvent, les portraits de femmes me paraissent toujours vouloir faire passer le message d'une façon un peu monolithique. Dire 'C'était seulement une victime' ou au contraire 'Ce fut une femme incroyablement géniale'... Bon, je trouvais ça quand même plus intéressant d'essayer de fabriquer des personnages féminins plus complexes et plus ambivalents que ça.

Je trouve que Jasmine Trinca nous séduit tellement que Maria Montessori en devient peut être un peu trop 'géniale' à son tour, mais malgré tout, je la vois comme une femme qui, même aux moments difficiles, a toujours été pétrie de contradictions. Elle fait un choix fort pour tous les enfants. Mais finalement, est ce que c'est vraiment pour eux ou était-ce aussi pour servir sa carrière, son ambition ? Je pense qu'il faut se poser ces questions là et qu'il n'existe pas une seule réponse simple. Il me semblait important de faire un biopic, ou en tout cas une forme de biopic, qui soit capable d'écorner une image trop sacro-sainte de cette femme. En montrant ses failles, cela la rend humaine.

Pour le rôle de Leïla Bekhti, j'ai galéré à trouver quel personnage féminin à l'époque pouvait être suffisamment fort pour lui faire face sans être sa copie conforme. C'est une femme qui tire sa puissance de sa capacité de séduction des hommes, et je la trouvais particulièrement intéressante cette opposition.

Je trouvais que la honte qu'éprouve son personnage, en vérité, c'est un peu le rapport que nous, on a toujours avec ces enfants porteurs de handicap. On sait qu'ils existent aujourd'hui, évidemment, mais tout le monde détourne quand même un peu le regard et est bien content de se dire qu'ils vivent dans leur endroit à eux, leur lieu spécialisé, bien loin des regards. J'avais vraiment à cœur de rentrer dans le film avec ce personnage qui n'arrive pas à regarder son enfant et qui la rejette. En créant un parallèle avec nos sociétés actuelles, l'idée était aussi de montrer le chemin parcouru depuis l'époque de Montessori, mais aussi ce qui nous reste à accomplir pour tous ces enfants. Et ce chemin, c'est un chemin du regard. Pour ça, le cinéma c'est le medium parfait."