M6 poursuit son cycle Die Hard, alors nous continuons à repartager son histoire secrète ! Voici l'épisode 4 : Retour en enfer.
1995. Une Journée en Enfer de John McTiernan finit son exploitation française à 3 263 430 entrées, soit cinq fois plus que pour le premier épisode en 1988. C'est (enfin) la consécration pour Bruce Willis et la saga Die Hard dans l'hexagone. Outre-Atlantique, la Fox pense immédiatement à la suite des aventures de John McClane.
Avant même la sortie d'Une Journée en Enfer, Quentin Tarantino avait proposé à Bruce Willis de réaliser le suivant, mais son offre restera sans suite (le studio avait pourtant proposé à Tarantino de réaliser un des clones de Die Hard, Speed). Après l'enfer du développement du 3, de nombreux sujets prennent la poussière dans les placards de la Fox, et c'est justement sur l'un d'eux que le studio va s'arrêter : celui de John Milius, qui se déroulait dans la jungle (cf épisode précédent). Intitulé Tears of the Sun, le script avait été rejeté, puis repris et modifié pour ne plus être un Die Hard. John Woo devait même en faire son deuxième film américain, après Chasse à l'homme, mais après six mois de travail, le cinéaste abandonne le projet quand il réalise qu'aucune star hollywoodienne n'acceptera de tourner plusieurs mois dans la jungle australienne, dans des conditions particulièrement difficiles.
Le studio décide alors de reprendre le scénario, de le modifier pour en refaire un Die Hard et en juillet 96, Fox annonce officiellement son "Die Hard dans la jungle" dans Daily Variety. Décrit comme un "Délivrance dans la jungle amazonienne", l'histoire devait raconter le détournement et le crash d'un avion dans lequel se trouvait McClane et sa famille, suivi d'une chasse à l'homme menée par des mercenaires désirant faire la peau de l'un des passagers. Une des idées du script était que McClane soit empoisonné, avec un temps limite pour trouver l'antidote et sauver le monde !
Die Hard 4 : Bruce Willis ne s'était pas régalé comme ça depuis un bail [critique]Un ton en dessous
En septembre 1996, Andrew Vajna, producteur du 3, déclare que John McTiernan ne reviendra pas aux commandes de la franchise - le salaire réclamé par le cinéaste étant jugé exorbitant. Jan de Bont (Speed) et Michael Bay (Rock) sont un temps envisagés pour prendre la suite. Et, après le succès de Will Hunting et Armageddon en 1997 et 1998, Fox décide que Ben Affleck (qui joue aussi avec Bruce Willis dans Armageddon) pourrait être l'acteur idéal pour incarner le fils de John McClane, toujours avec le même scénario. Mais la difficulté à aligner le planning des deux stars et, on imagine, l'entente peu cordiale entre Willis et Michael Bay, reporte le projet qui sera finalement abandonné. En 2000, à la surprise générale, Variety annonce que c'est Rob Bowman (X-Files) qui pourrait réaliser Die Hard 4. La preuve que le studio a décidé de réviser les ambitions de la saga à la baisse. Un nouveau scénario est rédigé, toujours dans un contexte de jungle : le fils de John McClane est enlevé par des mercenaires en Afrique du sud, et McClne doit aller le sauver et le rapatrier. Le 11 septembre 2001 met fin au projet, bientôt réécrit pour devenir Les Larmes du soleil (Tears Of The Sun) de Antoine Fuqua sorti en 2003, toujours avec Bruce Willis.
Besson en enfer
Parallèlement, et personne ne le sait encore, le script qui deviendra Die Hard 4.0 est en développement (depuis 1998) chez Fox, avec aux commandes... Luc Besson ! Tout part d'un article du journaliste John Carlin publié dans Wired, "A Farewell to Arms" qui raconte comment on pourrait mener une guerre sans armes, mais avec des ordinateurs. Acheté par la Fox, l'article est vite transformé en scénario par David Marconi (avec comme titre de travail WW3.com). Luc Besson est prêt à le tourner... quand le 11 Septembre enterre le sujet.
Deux ans plus tard, la Fox embauche le scénariste Mark Bomback pour réécrire le scénario et le transformer en un Die Hard. La version de Bomback comporte de nombreuses différences avec le script final : John McClane est une épave, divorcé, et abonné aux meetings des Alcooliques Anonymes. Il ne travaille plus pour la police, mais pour le département de la sécurité intérieure, où son job consister à arrêter des hackers qui mettent leur nez dans les affaires du gouvernement, un boulot en théorie sans danger. Jusqu'au jour où le hacker qu'il embarque se révèle avoir involontairement participé à une "Fire Sale", cyber-attaque de tous les systèmes informatiques et de défense... L'histoire mène McClane jusqu'à la Nouvelle Orleans, ou un déraillement de train et une explosion provoquée à distance par le méchant cyber-terroriste Gabriel déclenche un raz-de-marée qui inonde la ville. (L'ouragan Katrina, en 2005, fera disparaître cette scène du film).
John McTiernan : "John McClane n'est pas un héros national"Bruce tout puissant ?
L'ennui c'est que Bruce Willis, n'est pas convaincu par le scénario (McClane n'a aucun enjeu personnel et se contente d'être les muscles du hacker qu'il accompagne). Il demande alors à Doug Richardson, son ami et auteur des deux épisodes précédents, un rewriting qu'il va essayer d'imposer à la Fox. Richardson modifie le script tout en gardant l'idée de base, et il fait du hacker le fils de McClane, Jack, que notre flic newyorkais libère de prison après une incarcération pour piratage informatique.
Beaucoup plus construit que le film final, le scénario est divisé en 3 journées, décrivant méthodiquement comment les terroristes informatique décident de prendre l'Amérique entière en otage, ramenant le pays à l'âge des ténèbres dans un réminiscence de la fin de Los Angeles 2013. McClane et Jack doivent échapper à la fois aux forces de police et du gouvernement, en qui ils ne font pas confiance, et aux cyber-terroristes, qui veulent éliminer Jack parce qu'il en sait trop. Cette version a tous les éléments d'un Die Hard, et est digne des épisodes précédents de la saga : de nombreux personnages secondaires, tous distincts et attachants, des scènes d'actions explosives, McClane seul contre tous, un plan derrière le plan, des dialogues par téléphone, l'intrusion et le voyeurisme des reporters, des scènes d'émeutes et de loi martiale... L'une des images les plus fortes est celle de tanks de l'armée envahissant Harlem. Si Tom Rothman, le président de Fox, accepte de faire un contrat à Richardson principalement pour ne pas froisser la star, il préfère ranger le scénario dans un tiroir !
"Il ne reste qu'une seule scène de mon script dans Die Hard 4 Retour en Enfer" nous expliquait récemment Richardson, "C'est celle du vol de la voiture, qui au départ donc, mettait en scène McClane et son fils. Cette scène était là pour illustrer la différence entre leurs deux méthodes, et montrer à quel point le personnage de McClane est décalé dans le monde d'aujourd'hui. Ce qui est curieux, c'est que finalement, Belle Journée pour mourir met aussi en scène le fils de McClane, bien que je n'ai rien eu à y voir". Tom Rothman rejette en effet le script, et réussit à convaincre Bruce Willis de faire celui de Bomback, réécrit pour répondre aux appréhensions de la star, en utilisant des vielles idées datant du troisième épisode (la fille de McClane kidnappée). A sa sortie, le film connait un relatif succès (2 272 000 entrées France, soit un million de moins que le troisième volet), en raison principalement de sa violence atténuée (rattrapée dans un director's cut unrated disponible en DVD et en HD sur les sites légaux comme iTunes ou Vudu), tout en prouvant que la franchise a encore des ailes. C'était bien sûr, avant la sortie de Belle Journée pour Mourir...
Par David Fakrikian
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