Hugh Jackman revient ce soir sur TF1.
Eté 2013, Wolverine : Le Combat de l'Immortel sort au cinéma, quatre ans après le raté X-Men Origins : Wolverine, et quatre ans avant le très réussi Logan. A l'occasion de sa rediffusion à 21h sur TF1, nous republions notre critique :
Vu d’où on partait, The Wolverine ne pouvait être qu’une bonne surprise. C’est le cas, et c’est même un peu plus. Comparé au four artistique du X-Men Origins : Wolverine, Wolverine Le Combat de l’immortel de James Mangold est un peu le Citizen Kane du film de superhéros velu. A la différence du précédent, cette nouvelle aventure de Serval prend à bras le corps les thématiques du héros griffu et tente de les insérer dans un arc narratif plutôt bien foutu qui reprend le pitch de Superman II. Si le personnage fascine autant, c’est pour deux raisons : sa personnalité badass et ses affres existentielles (un superhéros qui ne veut pas de son superpouvoir). Dès sa (belle) ouverture c’est de ça que parle Mangold : en 1945, Logan sauve un soldat japonais du bombardement de Nagasaki – rouflaquettes de sortie, coolitude absolue, clin d’œil aux films de guerre un peu vénères… tout est là bien à sa place. On retrouve ensuite Logan, aujourd’hui. Plus barbu que jamais, hanté par la mort de Jean Grey et arpentant les forêts canadiennes, le Wolverine est devenu un animal qui fuit la civilisation. Mais elle se rappelle à lui sous la forme d’une Manga Girl surlookée qui doit le ramener à Tokyo. Là, il va devoir : affronter des ninjas, battre des politiciens corrompus, se coltiner un robot en adamantium, protéger la petite-fille de son ancien ami japonais, réussir à nouer son kimono sans se tromper et manger avec des baguettes… C’est pas gagné. L’enjeu du film ? Voir Logan perdre progressivement ses pouvoirs et sa force surhumaine…
Man Vs Wild
Dès le début, Mangold ancre son film dans le western et le film de ronin. Reprenant la trame d’une des meilleures aventures du comics, il emmène son héros en territoire hostile. La référence essentielle est le Josey Wales d’Eastwood (abondamment cité par Mangold lui-même), mais peut-être plus encore, on pense au très beau Jugement des flèches de Samuel Fuller dans lequel par dégoût des vainqueurs, un soldat de la Guerre de sécession s’enfonçait dans les territoires indiens. Fascination de l’impossible, tentative suicidaire (en finir avec lui-même, avec sa culpabilité), volonté pathétique de changer d’identité (redevenir humain ?), le parcours de Logan/Jackman qui en a ras-le-bol de son immortalité et se retrouve littéralement lost in translation chez les Japonais fait écho à celui de Rod Steiger dans le chef d’œuvre de Fuller. La différence, c’est que l’odyssée du mutant est d’abord une tentative de reconversion – il doit redevenir un héros, un soldat, ne serait-ce que parce qu’on l’attend comme tel dans le prochain X-Men Days of Future Past. De rachat aussi et d’élimination des fantômes. A une époque où les trois quart des blockbusters sont des begins, Mangold choisit donc de jouer la carte du spectaculaire old school, sans trop frimer, sans trop psychologiser pour privilégier les scènes d’action. Raté quand il essaie d'être fun (ou léger ou drôle - mon Dieu, la scène du Love Hotel), mais très consciencieux, Wolverine est surtout un vrai film d’auteur qui relève le niveau de la franchise et dialectise comme les X-Men de Singer les vrais thèmes comics. Ici : l’animalité contre la civilisation ; le sauvage contre la culture et les traditions.
Lost in tradition
Chaque plan, chaque cadre, porte la patte de l’auteur. Avec CopLand, son meilleur film à ce jour, Mangold signait un polar mythologique qui déguisait une belle brochette d’enragés (Stallone, Keitel, De Niro, Liotta) en figures de western déchues. Logan est clairement le cousin (pas germain mais hirsute) de Freddy, le personnage de Stallone, shérif balourd d’une ville peuplée de flics corrompus, plombé par sa pesanteur. Si Freddy était miné par les traditions morales d’une communauté qu’il était l’un des rares à prendre au sérieux, Logan lui est contaminé par une culture qu’il ne comprend pas. La manière dont il déploie sa lenteur dans les déplacements (il retrouve son humanité et les blessures lui font mal), son apathie et la mélancolie dans ses yeux brumeux donnent une étrange résonance au film. Sly était sourd (d’une oreille), Wolverine ne comprend rien au monde qui l’entoure, les coutumes, les traditions, la langue. C’est là qu’on touche finalement au cœur du projet. Comme dans ses autres films (CopLand donc, mais aussi Night and Day), Mangold confie à son acteur le moteur dramatique, cinétique et réflexif de ses films. Hugh Jackman EST Wolverine, mélange d’ironie constante et de premier degré assumé. Il porte sur ses trapèzes le poids du monde et de la culpabilité avec une classe assez géniale. Aussi charismatique barbu que glabre, Jackman rappelle que son Wolverine est l’une des créations les plus iconiques de la période 00. Bon. Il faut oublier les effets spéciaux défaillants, la fin gonzo et quelques scènes digne des ZAZ (le combat sur le train, grotesque), mais Wolverine fait plus que son travail, redonnant, après First Class, un peu de dignité à la franchise qui s'était abîmé avec X-Men 3 et le précédent Wolverine. Il annonce surtout, dans un super post-générique, le X-Men Days of Future Past de Singer. Et là, soudain, on a hâte.
Gaël Golhen
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