La comédienne et humoriste dévoile ce vendredi Jusqu'ici tout va bien, sa toute première série, dans laquelle elle incarne Fara, une journaliste télé en pleine ascension, empêtrée dans une sale affaire familiale. De la scène au polar, Nawell Madani se confie à Première.
Comment vous est venue cette envie d'écrire un polar sombre comme Jusqu'ici tout va bien, assez loin de votre univers habituel ?
Nawell Madani : Pendant le confinement, on a tous été des mangeurs de plateforme je crois. Et là, j'ai découvert la série Succession qu'on m'avait recommandée. J'ai fait la connaissance de Logan, de toute cette famille tiraillée dans tous les sens. J'ai aussi découvert d'autres séries comme Snowfall ou Validé. Je me suis baladée sur les plateformes et j'ai constaté qu'il n'y avait pas de série avec uniquement des meufs. Alors tout doucement, j'ai eu envie de me lancer un challenge et de faire un polar. Je n'ai fait qu'un seul film avant, avec C'est tout pour moi (en 2017), mais je me suis dit que j'allais tenter le coup. Alors j'ai tourné le pilote, en me disant que j'allais passer la main à d'autres réalisateurs. Et puis je me suis attachée à mes personnages, toutes ces femmes en qui j'ai mis un peu de moi, de ma famille, de celles qui m'ont fait fantasmer au cinéma. Et là je n'avais plus envie de lâcher la main. J'ai eu envie d'être créatrice, premier rôle et finalement réalisatrice du premier bloc d'épisodes, pour donner à la série son ADN...
Qu'est-ce qui vous attire dans le côté drama, par rapport à la comédie ?
Mais en fait, sur scène, je passe déjà du rire à l'émotion ! Ceux qui ont vu mon spectacle savent que je me livre profondément, notamment sur la relation avec mon père. Cela m'avait d'ailleurs inspiré le film C'est tout pour moi. J'aime ce ton un peu mélancolique, qui passe du rire aux larmes. Un genre que Nakache et Toledano maîtrisent à la perfection. C'est vers ça que je veux tendre.
Mais Jusqu'ici tout va bien va plus loin encore. C'est presque une série noire...
C'est un polar à ma façon ! (rires) Ce que je veux dire, c'est que je me suis permis plein de choses. Je me suis marrée à écrire les dialogues des ados. Je me suis éclatée à faire des méchants qui ont de la gueule, qui ont de la tchatche et qui ne sont pas que des porte-flingues. Je me suis amusée à faire un antagoniste charismatique et très beau, parce que je voulais qu'on ait envie de sortir avec lui. Bref, j'avais envie d'explorer tout ça. Et quand Netflix m'a parlé de faire une comédie, je leur ai répondu que je me savais attendue dans ce registre, et que j'avais envie d'autre chose, de me challenger, de montrer des femmes fortes, le lien sacré d'une famille...
Vous vous êtes inspirée de votre propre famille, de votre vie, pour écrire ces personnages ?
Ils sont inspirés de plein de choses, mais aussi de ma propre vie effectivement. J'ai une sœur qui a porté le voile pendant plus de dix ans, par exemple. J'ai une autre sœur qui éduque aussi deux garçons... Donc oui, comme n'importe quel scénariste, je me suis nourrie de ma vie personnelle. Et comme dans la série, d'ailleurs, mon père regardait le journal télévisé de Claire Chazal, de manière religieuse. J'avais même l'impression que c'était ma tata ! (rires) C'était les infos, il fallait faire silence et mon père buvait ses paroles. Tout ce qu'elle disait, c'était vrai. Alors à mon sens, les médias ont une énorme responsabilité du coup, et c'est aussi ce que j'ai voulu dire dans la série.
Votre personnage, Fara, est journaliste pour une chaîne d'info en continu qui travaille de manière douteuse. Quel message avez-vous eu envie de faire passer sur les médias ?
Avec ces nouvelles chaînes, on est souvent dans le sensationnel et le spectaculaire. Alors comment on fait, quand on se doit de ne pas se tromper ? Comment est-ce qu'on fait pour ne pas entacher les banlieues ? Je pousse le curseur, pour montrer qu'on préfère filmer une voiture qui brûle, plutôt qu'un jeune qui monte une entreprise et qui réussit... Ca existe et j'en parle, mais je m'en sers en fait comme d'un levier de fiction. Après, je force le trait parce que c'est plus amusant comme ça.
Est-ce que c'est difficile d'écrire un polar, quand on est plutôt habitué à écrire de la comédie ?
J'ai co-écrit la série avec Simon Jablonka, qui a notamment travaillé sur Engrenages, et d'autres co-auteurs qui m'ont aidé à toujours remettre de la tension au cœur du récit. Ils avaient des techniques d'écriture, des canevas, que je n'avais pas. Moi, j'avais les faits. J'avais plein d'infos après avoir échangé avec des policiers, des voyous, des journalistes. Ce qui me manquait, c'était de savoir comment mettre tout ça en forme, pour que ça ne devienne pas une succession d'anecdotes qui s'enfilent.
Après cette première expérience dans la série dramatique, est-ce que vous avez toujours l'envie de monter sur scène pour faire du stand-up ? Ou est-ce que c'est derrière vous maintenant ?
J'aime la scène avant tout, donc je vais bientôt y revenir pour mon deuxième spectacle. Jamais je n'ai imaginé arrêter le stand-up. J'adore ça. Je suis d'ailleurs retournée sur scène le soir même du dernier jour de tournage de Jusqu'ici tout va bien. Tellement c'était viscéral, tellement j'avais besoin de retrouver le contact du public, après deux ans et demi à ne faire que tourner. Mais je suis très fière de cette série et on me parle déjà de la saison 2. Maintenant, avant de me projeter, je veux déjà voir si j'ai réussi l'exercice...
Jusqu'ici tout va bien, sur Netflix à partir du 7 avril 2023
Commentaires