Première
par Gérard Delorme
Après My Joy, son premier long métrage, Sergeï Loznitsa continue son exploration de la ténébreuse âme slave en suivant un homme innocent dans un monde qui ne laisse pas de place à la vertu. Même si l’ironie semble parfois favoriser le personnage, il n’en profite jamais pour se sauver. Au contraire, il ajoute une charge à son fardeau déjà lourd, comme si le fait d’être le seul témoin de ses actes l’obligeait à d’autant plus de rigueur. Cet étrange dilemme moral d’un homme condamné à se punir lui-même aurait pu s’intituler Châtiment sans crime. Le bémol, si l’on s’attend à du suspense, c’est que presque tout est déterminé dès le début, le film détaillant, sur un rythme très lent, aussi bien l’environnement que les gestes nécessaires à la survie, comme essorer ses chaussettes après s'être plongé dans l’eau glacée. L’admirable photo d’Oleg Mutu apporte une réalité très sensible à cette saga dans le froid et l’humidité de la forêt. Mais il vaut mieux choisir une salle bien chauffée.