- Fluctuat
Van Damme donne aux autres le droit de faire des films. Il ne sauve pas seulement sa peau mais le cinéma tout entier. Mort de la critique. Mort du monde civilisé. Deux chroniques sur le cinéma selon Jean Claude.
I - Vandamme et le 7ème Art
Les films de Jean-Claude Vandamme sont toujours très attendus par les cinéphiles. Comme Godard, Vandamme est l'un des derniers grands professionnels à se poser la seule question qui vaille encore : que peut montrer le cinéma aujourd'hui ?Dans Histoire(s) du Cinéma, Godard balbutiait brillamment que le propos cinématographique (à cause d'Hollywood et de toutes ces merdes américaines) ne pouvait trouver que pour seul abri l'interstice entre deux images (l'espace cinème ou l'art du montage).
VanDamme va plus loin : en projetant ses héros habituels dans le désert, il montre que l'homme-cinéma peut inexister en repoussant les frontières du cadre (grand champ, le désert) et de l'effort physique.
L'ENERGIE situe le discours dans l'immédiateté, immédiateté qui n'a pour parler aucunement besoin de la légitimité que JLG recherche à tout prix par des voies laborieuses (collage et tout le toutim). VanDamme peut, par la seule puissance de son corps, parler A BON DROIT.Légionnaire est, en ce sens, un exemple de ce que sera le cinéma de demain : une totalité représentative. L'Histoire -;avec un grand H- est revisitée à partir de sa concentration dans une colonne de légionnaires qui avance. Vers quoi ? Peu importe. Un fortin comme dans le désert des Tartares. Sa propre mort. Mort du cinéma. Mort des acteurs incapables d'aligner trois mots ou simple mort de leur personnage. VanDamme, toujours plus fort, emmène le spectateur dans un désert-movie squelettique où tombent un à un les « gimmicks » qui avaient assuré le succès commercial de ses films précédents. Fi du scénario : un type recherché par la mafia ? Ah, ah, qui croira à cette connerie. Le kung-fu ? Tout le monde s'en moque. Pas d'action pour les légionnaires, juste la mort incarnée par des touaregs spectraux, doubles génétiques de la mort du Septième Sceau de Bergman et qui essaiment des bastos à la sauvette avant de se perdre dans les dunes.Mort du sexe. VanDamme ne s'arrête même pas pour trousser une blonde en ombres chinoises. Mort de la blonde hitchockienne. La muse -;abandonnée au pays- se teindra les cheveux en brun. VanDamme est queer. Ouverture du troisième sexe. Rédemption finale. Le héros grec traverse l'armée des ombres en chantant « Tiens, voilà du boudin, voilà du boudin ». Surrection de musique populaire dans un final métaphysique. Clap. Clap. Le cinéaste belge donne aux autres le droit de faire des films. Il ne sauve pas seulement sa peau mais le cinéma tout entier. Mort de la critique. Mort du monde civilisé.II - Vandamme et la 7ème compagnie
VanDamme était au cinéma ce que Rocco Siffredi est au porno. Même physique tiré d'un chromo de Pierre et Gilles. Impeccable, musculeux, luisant sous la lumière des projecteurs. Même accent exotique anglo-belge pour l'un, italo-bovin pour l'autre et surtout passion intacte teintée de prétention pour ce qu'ils font : la baston chez JVD, la baise de compétition pour Rocco, domaines tellement proches qu'ils appellent les mêmes qualités, beaucoup d'entraînement, la répétition sadienne d'actes de mise à mort des adversaires (le coup de pied qui tue contre la sodomie- pal) et l'usage parcimonieux des mots (" Tou vé ké jé té sodomize ? " " Che vais t'exploser la fasse, sale pédé chinetok ? ").Avec Légionnaire, Vandamme oublie les fondamentaux par pure prétention. Mônsieur s'essaie à la fresque historique. Il emmène ses copains bien montés dans le désert (chouette idée qui change des salles de combat habituelles) mais laisse son karaté à la maison. Non, non, pas de savate. Rien que de vrais fusils Lebel à un coup. Comme si Rocco jouait dans de vrais films. La gloire ne lui a pas tourné la tête au moins. Dans son dernier succès, Rocco et les Sex Mercenaires, la star s'offre un voyage au far-west mais n'oublie pas sa baguette magique. Car, enfin, ce qu'on demande qui à JCV, qui à Rocco, c'est que ça fuse dans tous les coins, que ça crie et que les femmes se fassent botter le cul. C'est vrai, Jean-Claude, que c'est plus marrant de chanter à poil dans le désert avec des criminels de tous les pays (en plus, sa Légion Etrangère ressemble aux Brigades Internationales !), de prendre des douches sous des paillotes et même de faire des blagues quand on se passe la savonnette. C'est vrai que le corps d'un homme au soleil (la peau burinée, la barbe de trois jours), c'est plus joli à voir que les coups de soleil sur les nichons de Claudia Schiffer mais bon...ça n'empêche pas que même entre mecs de la jaquette on s'envoie quelques lattes dans la gueule.Allez Jean-Claude. Reprends-toi. Et si tu faisais un truc avec Christophe Lambert ? Ou même avec Rocco. Réalisé par John Woo. Quelle gueule ça aurait. Avant l'an 2000, OK ?Légionnaire
De Peter Mac Donald
Avec Jean-Claude Van Damme, Steven Berkoff, Adewale Akinnuoye-Agbaje
Etats Unis, 1998, 1h34.
Legionnaire