A la fois énorme machine comique et cinéaste mu par un souci de justesse, Franck Dubosc occupait une place à part dans l’univers de la comédie française. Lassitude ? Crise d’inspiration ? En tout cas, après ses deux films de réalisateur, Tout le monde debout et Rumba la vie, il a visiblement décidé de changer de genre et de registre. Au début d’Un Ours dans le Jura on suit, en pleine montagne française, des migrants chargés de transporter de la drogue pour un mafieux. Un empalement, un carambolage et quelques coups de feu plus tard, un pauvre type du cru se retrouve avec un paquet de fric trop gros pour lui. C’est le début des emmerdes.
Des maisons retranchées sous une épaisse couche de poudreuse, un trou paumé dans les glaces du Jura… Le décor n’est ici pas qu’un prétexte. En donnant un nouveau cadre à son cinéma, Dubosc lui redonne aussi un nouveau coeur. Son regard posé, attentif au réel, crée du relief là où il n'y en pas. Tout semble plus vibrant dans ce territoire recouvert d’un manteau blanc. Les chalets, le super U, la maréchaussée, mais surtout les gens qui y vivent. Il y a ce gendarme bonhomme et émouvant (joué par un Poelvoorde plein de tendresse), cette femme qui s’ennuie mais qui va progressivement se prendre au jeu (Calamy speed et fantasque) ou cette flic plus maline que prévue (Joséphine de Meaux). Car si la comédie noire sur fond immaculée est bien ficelée, c'est en marge de l'intrigue que cet Ours trouve sa vraie carburation. Dans l'intimité engourdie des autochtones. Dans leurs dialogues au ralenti et dans l’attention portés aux détails qui deviennent amusants sans crier gare. C’est parfois trop (trop riches - les intrigues débordent - trop zinzin aussi), mais la vraie force du film, c’est que ces personnages reprennent toujours le dessus.