Hors Normes, le nouveau film d’Olivier Nakache et Eric Toledano
Gaumont

Présenté en « Dernière séance », après la proclamation du palmarès, Hors-Normes, le nouveau film du tandem Nakache - Toledano, est un choc qui change notre regard sur l’autisme et met en avant le don de soi. Sans discours ni morale. Une totale réussite.

Ca commence fort. Dans les rues, Malik course une jeune femme devenue incontrôlable sous le regard inquiet des passants. Dans le métro, Bruno vient extirper un jeune homme qui a tiré le signal d’alarme des reproches des agents RATP. Le décor est planté. Il est difficile pour les autistes de s’intégrer à la société, d’en respecter toutes les règles. Il est encore plus difficile de le faire comprendre aux autres. Le rejet est violent. Bruno et Malik avec leurs associations se battent au quotidien pour changer la donne. L’histoire du film s’inspire du combat des structures hors normes: Le silence des Justes et Le Relai Ile de France.


Un duo plein d'humanité

Hors Normes, c’est d’abord un film sur le don de soi. Les deux protagonistes ont certainement sacrifié leur vie à aider les autres. Bruno, toujours entre deux coups de fil urgents, n’a pas pris le temps de tomber amoureux. A 40 ans passés, il se prête, de mauvaise grâce, à des blind date organisés par son entourage. Ces scènes sont des respirations burlesques dans le récit combattif de sa vie. Vincent Cassel est incroyable dans ce rôle : toujours dans l’empathie, le regard doux, sûr de ses paroles avec les autistes et si tendu quand il s’agit de parler aux femmes. C’est une de ses plus belles compositions.
Malik - on le sent de manière plus fugace- a plus vu ses enfants endormis que partagé leurs repas. Son temps, il le consacre à former des jeunes à qui la société ne donne plus d’espoir et auxquels il propose de devenir « référent » pour des autistes. Redevenir quelqu’un en s’occupant des autres, c’était aussi le credo d’Intouchables. Reda Kateb est bouleversant dans ce rôle. Il sait aussi faire poindre l’affection qu’il porte à son ami, Bruno.

 

Eric Toledano et Olivier Nakache des réalisateurs citoyens

Hors Normes c’est aussi un film sur l’intégration. A celle quasi impossible des jeunes autistes, Toledano Nakache opposent celle qui unit des encadrants de toutes religions et croyances. Bruno, le juif pratiquant, évolue au milieu des femmes voilées. Malik, le musulman, mange cacher dans la cantine tenue par les loubavitch. La caméra ne s’attarde jamais sur les signes extérieurs de religion, et pourtant, ils sont là, présents. Les cinéastes nous présentent la France telle qu’ils la rêvent, unie dans la différence. S’il y a un message au film c’est celui-là.
Et puis, là où le duo Toledano Nakache frappe fort, c’est en changeant notre regard sur les autistes et l’état de leur prise en charge en France. Loin de de faire le portrait de trajectoires idéales, les réalisateurs s’attardent sur leur difficultés à surmonter le handicap. On n’est pas dans le feel-good movie simpliste. L’émotion que nous procurent les petits progrès de ces cas lourds est un coup au coeur. On sort bouleversé de la magnifique scène de danse de Joseph interprété par Benjamin Lesieur. Le Festival de Cannes ne pouvait finir sur une note plus sincère.