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Un plan fixe en suspension au-dessus de Téhéran. Un plan qui dure suffisamment pour permettre à notre regard de scruter l’espace, de saisir le murmure de la ville qui s’étoffe à mesure que la ville se réveille. En légère suspension donc, à une hauteur inatteignable, protégé du chaos. Le dispositif qui se met ensuite en place nous ramène au plus près de visages mais dans une position tout aussi démiurgique. La caméra se veut subjective dans l’idée d’un face à face permanent entre ces neuf hommes et femmes dont nous allons entendre et voir les mésaventures. Neuf, pour autant de sketches, venant traduire la violence des rapports dans la société iranienne d’aujourd’hui où l’administration cherche à contrôler les âmes et les consciences. Une comédie à l’iranienne comme jadis s’écrivait l’italienne. Un homme veut enregistrer le prénom de son enfant tout juste né et se voit sommer de trouver un prénom conforme aux lois du pays, un autre, venu chercher son permis de conduire dévoile ses tatouages à un officier dans une intolérable mise à nue. Le duo de cinéastes nous place du côté d’un mal que l’on ne voit pas. Le geste est implacable. Dans chacune de ses situations la bestialité s’insinue frontalement. Au pays des mollahs personne ne s’excuse d’être ce qu’il est. Le plus terrible prend la forme d’un entretien d’embauche où une jeune femme subit un exercice de drague dont la lourdeur est malheureusement universelle. A la fin, la ville s’effondre de tant de bêtises. Le cinéma permet ça. Puissantes chroniques.