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En 1964, Agnès Varda signait Le Bonheur. C’est encore ce sentiment qui plane en voyant cette très personnelle autobiographie qu’est Les Plages d’Agnès. Toujours aussi facétieuse, la réalisatrice choisit des chemins de traverse pour se raconter et raconter ceux qui ont croisé sa route. Elle s’égare avec un plaisir contagieux dans les entrelacs de ses souvenirs et de ses rencontres, s’amuse au jeu délicieux du « marabout-bout de ficelle », colle et accole images du passé et du présent, réunit morts et vivants, sautille de Bruxelles à Noirmoutier en passant par Sète, plages qui ont marqué sa vie, plages de vie. Ce faisant, elle nous offre, à sa manière ludique et poignante (comme quand elle évoque la figure aimée de Jacques Demy), une leçon de cinéma et une leçon de vie mêlées. D’un rien, elle fait une œuvre : quelques miroirs face à la mer, du sable dans une rue parisienne, une maison faite de bouts de pellicule..., inventant là, en quelques secondes, plus d’images de cinéma que la plupart des réalisateurs en une carrière. On se glisse donc avec délice dans l’ombre de cette dame malicieuse, libre, sereine, généreuse, et définitivement amoureuse de la vie et du cinéma.
Toutes les critiques de Les plages d'Agnès
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Paris Matchpar Alain Spira
Son film à facettes raconte tellement d'histoires, déborde de tant d'idées, fait jaillir tant de rêves et verser tant de larmes cachées qu'on ne sait par quel bout de pellicule le prendre. En composant ce collage inspiré et respirant, elle signe un chef d'oeuvre au sens noble et artisanal du terme.
- Fluctuat
Avec Les plages d'Agnès, Agnès Varda réussit un essai autobiographique filmé avec une légèreté et une intelligence de chaque instant, loin de toute nostalgie et complaisance. Brillant, émouvant, drôle, vivifiant, serein.Difficile exercice que celui de l'autobiographie, auquel Agnès Varda se livre dans Les plages d'Agnès. Trouver la bonne distance, éviter la complaisance, tout un art du point de vue, sur soi, le monde, et une question de cadre, celui qui délimite et ouvre. Si on avait des craintes à l'idée d'imaginer Varda feuilletant sa vie comme un album de souvenirs, celles-ci s'envolent dès les premières images. Accompagnée de ses assistants, on découvre Agnès en petite mamie tonique et malicieuse s'amusant à poser des miroirs sur une plage. Pendant qu'elle introduit son projet pour nous faire entrer dans la confidence, les plans se composent progressivement de cadres dans le cadre, de jeux de reflets servant de contrepoints discursifs et réflexifs au film en train de se faire. L'image est sublime, délicate, et chaque cadrage d'une intelligence manifeste et offerte sans retenue. La problématique est alors posée avec la plus grande transparence : Les plages d'Agnès sera un film puzzle, fait d'images de soi, celle qui filme, et les autres, qu'elle regarde. Le cinéma et la photographie y marcheront main dans la main, comme l'art et la vie, qu'on distinguera rarement. Ce n'est pas la première fois que Varda s'introduit au coeur du dispositif de ses films, mais jamais elle ne s'était prise comme sujet, retraçant ici les grandes étapes de son existence, de l'enfance à aujourd'hui.Film casse-gueule, Les plages d'Agnès contourne avec une grâce perpétuelle les pièges de l'autobiographie. Il est porté par une légèreté qui n'a d'égale que sa précision, sa capacité à rentrer au coeur du détail d'une simple caresse. Sa beauté tient dans cette idée à laquelle il reste fidèle : faire un film qui marche à reculons. Pas la moindre once de nostalgie n'entrave ainsi le projet ; il avance du passé au présent, au fil d'une continuité éclatée où les morts et les vivants cohabitent, sans regrets, tout juste quelques larmes pour ceux qu'Agnès a aimés : ses amis, ses proches, et bien sûr Jacques Demy, dont il est beaucoup question. On ne se remet jamais du grand amour de sa vie. En partant des bords (les plages), donc du contour du cadre, le film pénètre petit à petit un kaléidoscope formant une image en morceaux de la vie artistique et personnelle de Varda. Une existence riche, pleine de rencontres, de Jim Morrison, jean-luc godard et alain resnais, à ces inconnus qu'Agnès aime également, sans distinction. Rares sont les films portés par une telle générosité, on y avance au mouvement des vagues, d'avant en arrière, avec une acuité constante des visages. Et aucun coup de bluff ou sentiment de triomphe, pas une période, que ça soit la Nouvelle Vague ou les premiers succès, n'est idéalisée. Tout est raconté sur le ton de l'anecdote, presque avec désinvolture, car on ne s'appesantit pas, jamais Varda ne tombe dans les pièges de la mémoire ou de la vanité.Les plages d'Agnès démontre encore, et tant pis pour ceux que ça exaspère, la virtuosité de cette génération d'auteurs. Ici la simplicité du dispositif n'empiète jamais sur sa complexité théorique. Le film est limpide, littéral, et pourtant d'une richesse permanente, bourré d'idées de mise en scène proche du happening, souvent avec un humour désarmant de facilité mais enivrant d'ingéniosité. Il y a dans ces Plages un art du croquis, de la photo volée mais complice, sans cesse remis en perspective dans l'histoire de Varda et du film qu'elle fabrique avec nous, devenus d'improbables assistants monteurs triant des images que sa mémoire protège de l'usure du temps. Et si la mort hante au loin, elle n'est pas une angoisse. Sans ressentiment, sans amertume ni crainte de disparaître, Varda signe un film lumineux et serein à l'aisance discrète. On pouvait craindre le déballage un peu pathos, l'oeil mouillé en souvenir du grand Jacques, mais on y échappe sans cesse, toujours sur le fil entre la confession et la pudeur, sauvé par une touchante déclaration d'amour et d'absence. Au fond, Les Plages d'Agnès ne cesse de raconter la vie d'une femme avec les autres. C'est d'abord une histoire de rencontres avant un film à la première personne : comptent moins les grands moments de la vie de Varda, que ceux avec qui elle les a traversés et les traverse encore. D'où sa grandeur et sa modestie, sa curiosité bouillonnante, filmées avec une élégance à la force tranquille et revigorante.Les Plages d'AgnèsDe Agnès VardaSortie en salles le 17 décembre 2008Illus.© Les Films du Losange - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils documentaire, réalisateur sur le blog cinéma- Agnès Varda sur Flu : la critique de l'exposition Ile et elle en 2006 à la Fondation Cartier ; l'entretien avec Agnès Varda à l'occasion de la ressortie du Bonheur
Ellepar Françoise DelbecqSa vie, son oeuvre. Tout, vous saurez tout sur Agnès Varda. Le vrai, le faux, le laid, le beau ...
Le JDDpar Alexis CampionTendre et facétieuse Agnès Varda. A l'approche de ses 80 ans, cette pionnière de la Nouvelle Vague a ressenti le besoin de raconter sa vie sous forme d'autodocumentaire. Un genre casse-gueule mais qu'elle sublime avec la grâce d'une femme à ciel ouvert (...). Captivant et pétri d'émotion.
Pariscopepar Virginie GaucherVaguement chronologique, avec de fréquents retours au présent, l’histoire adopte la forme du conte, du collage, du docu-fiction, mêle extraits de films, photographies, mises en scène, installations. Une œuvre pleine de fantaisie, d’humour, d’autodérision, mélancolique mais pas nostalgique. Un film dans lequel Varda parle de Varda mais surtout des autres, avec tant de naturel, de générosité, de simplicité que le cœur est étreint. Un film d’amour à la vie, au cinéma, aux siens.