Toutes les critiques de POLICIER, Adjectif

Les critiques de Première

  1. Première
    par Philippe Rouyer

    Avec 12 h 08 à l’est de Bucarest, Caméra d’or à Cannes en 2006, Porumboiu avait amorcé le renouveau du cinéma roumain. C’est dire si l’on guettait son deuxième long métrage, qui ne répond que partiellement à nos attentes. Le film adopte un dispositif très austère, qui contraint le spectateur à avaler de longs plans-séquences où il ne se passe pas grand-chose pour préparer un final éblouissant. (...) Il n’est pas interdit de trouver quelque chose de vertigineux dans cette représentation de l’attente, mais autant être prévenus. Et savoir que le jeu en vaut la chandelle. L’affrontement qui suit, entre Cristi et son chef (génialement incarné par l’avorteur de 4 Mois, 3 Semaines, 2 Jours), autour du sens des mots « loi », « morale » et « conscience », est totalement jubilatoire.

Les critiques de la Presse

  1. Positif
    par Vincent Thabourey

    Corneliu Porumboiu aurait pu se contenter de faire fructifier les riches acquis de 12:08 à l'est de Bucarest, son premier long-métrage (...), et de développer paresseusement cette veine historico-burlesque qui est l'une des marques du renouveau cinématographique en Roumanie. Il a préféré nous surprendre avec cette farce lente à la fébrilité sous-jacente, cherchant dans son environnement intime les failles d'un pays en pleine recomposition.

  2. Télérama
    par Samuel Douhaire

    Policier, adjectif est un polar. Décalé, certes, à l'image de son titre étrange. Plus proche d'un Melville sous Tranxène que d'un John Woo, mais un polar. Et comme dans tout bon polar, un dilemme moral est au coeur de l'intrigue. (...) Les partis pris esthétiques de Corneliu Porumboiu s'accordent au choix éthique de son héros. La caméra reste à distance, comme si elle était le regard de Cristi épiant en retrait les ados qui fument. Quand le policier entre dans le champ pour récupérer les mégots suspects, la caméra ne bouge pas : Cristi se retrouve à l'emplacement exact des ados, manière de souligner que le flic est, au fond, plus proche des lycéens que de ses supérieurs.

  3. A voir à lire
    par Claude Rieffel

    L’aspect le plus frappant du film est sans doute son côté « dispositif » : plans fixes, avec des personnages assis selon une configuration qui n’évolue pas, répétitions en accord avec la monotonie bureaucratique des activités du personnage, ce carcan qu’il tente de briser sans en être vraiment conscient et sans en avoir les moyens.
    Les références à Antonioni et Bresson sont, certes, un peu écrasantes, mais elle sont néanmoins pertinentes. Cependant le véritable prix de ce film est sans doute ailleurs : dans la pointe d’humour absurde , plus discrète que dans 12h08 à l’est du Bucarest, qui affleure souvent. Elle donne au parcours et au conflit moral - l’opposition entre loi et justice - qui agite un personnage peu sympathique au départ mais gagnant en humanité au cours du film, un côté à la fois dérisoire et poignant.

  4. Le Monde
    par Jean-Luc Douin

    C'est avec ce ton propre aux Roumains, cet humour, ce sens du dérisoire, que Porumboiu met le doigt sur une hypocrisie du comportement arc-boutée sur l'absurde d'un vocabulaire. Marié à une enseignante de français qui lui donne des leçons sur les figures de style, Cristi incarne le bon sens du citoyen terre à terre, et il n'entend pas punir aveuglément.
    Les mots n'ont pas pour lui le même sens que celui qu'ils ont pour les gens cultivés, ou pour les obsédés de la sécurité, ceux qui veulent faire du chiffre dans les commissariats et ignorent la notion de circonstances atténuantes. Cristi n'a cure que, nom ou adjectif, le mot "policier" change de fonction, voire d'orthographe. Ce qu'il ressent à l'énoncé d'une notion (loi, conscience) ne correspond pas à ce qu'en dit le dictionnaire.
    La réflexion sémantique à laquelle le soumet son chef nous vaut un final digne de Ionesco, séance d'humiliation et de philosophie morale. Le Littré local devient l'accessoire homérique d'un film fait avec presque rien, sauf l'essentiel : l'art de vivre ensemble et d'en communiquer les règles.