Une série criminelle diablement originale et déroutante, mais pas aussi folle qu'elle aimerait l'être.
Benedict Cumberbatch renoue avec son côté Sherlock. Dans Eric, la nouvelle série criminelle qui sort ce vendredi sur Netflix, l'ancien Doctor Strange cherche désespérément son fils disparu dans les méandres d'un New York crasseux, avec l'aide d'une peluche géante tout droit sortie de son imagination. Un polar aux multiples facettes, parfois passionnant, mais très inégal.
Dans Eric, l'acteur anglais incarne Vincent, star de télé en décalage total avec l'émission pour enfants de marionnettes qu'il a créée (sorte de variation de l'émission Sesame Street). Alors qu'il prêche bienveillance et compassion dans son programme, Vincent cache une personnalité sombre et torturée. Alcoolique misanthrope, imbus de lui-même et pas vraiment heureux dans son mariage, Vincent bascule quand son petit garçon de 9 ans se volatilise mystérieusement sur le chemin de l'école. Alors que la police n'a aucune piste, Vincent décide de partir à la recherche de son gamin, avec l'aide... d'une grosse peluche bleue de 2 mètres nommée Eric. Evidemment, Eric n'existe pas vraiment, hormis dans la tête de Vincent. Sorte d'exutoire en forme de nounours géant, il lui permet de supporter sa souffrance quotidienne et sa haine des autres.
Le binôme arpente ainsi le New York des années 1980 de haut en bas. Des beaux quartiers d'où est issu Vincent, aux tunnels crasseux du métro où vivent les plus démunis rejetés par un système capitaliste qui ne fait pas de prisonnier. La scénariste britannique Abi Morgan (qui a signé le gentil biopic La Dame de Fer et le très sulfureux Shame) a beaucoup de choses à dire. Elle décrit une cité sordide dominée par des flics pourris et des politiciens arrivistes. S'appuyant sur cette atmosphère poisseuse, on sent qu'Eric a envie d'explorer ces thématiques sociétales en profondeur, pour dénoncer le racisme systémique ou l'homophobie cinglante de l'époque. L'acteur McKinley Belcher III tire ainsi son épingle du jeu en inspecteur gay afro-américain, fatigué de devoir donner le change face à ses collègues policiers. Son incarnation stoïque est bouleversante. Et c'est là qu'Eric est indéniablement la plus passionnante.
Ce faisant, elle perd aussi le fil de son étrangeté hallucinée. Les investigations de Vincent et de sa peluche deviennent dispensables. Le nounours imaginé n'apporte pas grand chose au récit, hormis balancer quelques vannes cinglantes ici et là. L'artifice devient de plus en plus inutile, voire encombrant pour un Benedict Cumberbatch stupéfiant de mélancolie. À force d'osciller entre le Zodiac de Fincher et le Birdman d’Iñárritu, Eric peine à trouver sa raison d'être.
Eric, en 6 épisodes, mini-série à voir sur Netflix le 31 mai 2024.
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